dimanche 27 janvier 2019

La famille s'agrandit !

Je vous parlais dans la présentation de ma petite famille de ma soprano baroque 440Hz en palissandre de chez Marie Hulsens. D'une part cette flûte s'est un peu désaccordée et il faudrait que je la fasse réviser, d'autre part je ne voyais plus très bien l'intérêt d'avoir une soprano baroque alors que je joue tout sauf de la musique baroque sur cette flûte : renaissance, médiévale, celtique, traditionnelle... 

Aesthé renaissance
J'avais envie d'une flûte avec un son plus large et plus puissant, d'un modèle renaissance dont la perce est plus large et qui "donne" donc plus de son. J'avais prévu d'essayer une Aesthé renaissance lors du passage de Jean-Luc Boudreau aux Journées de Musiques Anciennes de Vanves en novembre dernier, mais ce festival a malheureusement été annulé et je ne me sentais pas de commander à nouveau une flûte sans l'avoir essayée, bien que je sois très contente de mon alto Aesthé commandée il y a quelques années. 

Adri's dream

J'ai profité de mon passage à Malines pour en essayer plusieurs sur les deux ou trois stands présents, dont celui de Mollenhauer. J'avais essayé les Adri's dream, celle en érable ne me plaisait pas du tout, celle en prunier était mieux mais je la trouvais un peu chère pour la qualité. Ça c'est pour mes souvenirs, mais en consultant le catalogue de Mollenhauer, je me rends compte qu'il existe une seule soprano Adri's Dream toute en bois, et qu'elle est en poirier. Dont acte pour le poirier, mais j'étais pourtant sûre d'en avoir essayé une autre dans un bois plus foncé plus chère et avec un meilleur son...  


Parmi les flûtes essayées ce jour-là, j'avais adoré la Kynseker en prunier et la sensation que j'avais ressentie ne m'avait pas quittée depuis. J'ai eu le bonheur de m'en faire offrir une pour mon anniversaire, que je suis allée moi-même chercher - et réessayer - au magasin Woodbrass de Paris qui a vraiment un choix intéressant de flûtes à bec pour une enseigne généraliste.


Je ne suis pas du tout déçue par cette flûte qui est telle que dans mon souvenir. Elle est en 440Hz, ce qui est normal pour une flûte renaissance "standard" (le 415Hz est réservé à la musique baroque). On peut trouver des flûtes renaissance dans d'autres diapasons chez certains facteurs (466Hz, 392Hz, ...), mais il faut alors pouvoir jouer en consort avec des flûtes au même diapason. En école de musique lambda, ce n'est bien sûr pas possible et d'autant plus si on veut pouvoir l'utiliser en orchestre moderne. Et le prix est de toute façon rédhibitoire en ce qui me concerne et pour l'usage que j'en fais.

Elle est en doigté baroque mais n'a pas de doubles trous pour le ré et le do, ce qui est plus conforme aux instruments de cette époque, la perce est donc plus large que sur une flûte baroque, et les trous sont plus gros, ce qui procure une sensation plutôt agréable au toucher. Le fait de ne pas avoir de doubles trous n'empêche pas de jouer le ré# ni le do#, c'est juste un peu plus délicat à enchaîner avec certaines notes (le passage du sib au ré# dans Sir Ulick Burke m'a causé quelques soucis).

Elle convient parfaitement aux musiques que je joue à la soprano. Il me reste à faire réviser ma soprano baroque afin de pouvoir la vendre, car du coup je ne pense pas l'utiliser encore, bien qu'elle reste une excellente flûte (et j'aimerais bien me dégager un petit budget pour aider à l'achat d'une ténor en bois...).

Hieronimus Franciscus Kynseker (1636-1686) était un facteur d'instruments à vent de Nüremberg en Allemagne. Il nous reste plusieurs de ses flûtes à bec, conservées au German National Museum de Nuremberg, au MMA de New-York et aussi au Musée de la Musique à Paris.


Plusieurs copies de ces instruments ont été réalisées - et utilisées entre 1853 et 1924, puis dans les années 1970 par Herbert Paetzold (plus connu pour ses flûtes carrées), d'après les instruments du Germanisches Nationalmuseum. Mollenhauer les fabrique depuis 1982, et propose toute une gamme de la garklein à la grande basse (Moeck fabrique également une soprano et une alto). Ces flûtes sont un peu intermédiaires entre la flûte renaissance et la flûte baroque (moins droites que la flûte renaissance, largeur de perce et de trous entre flûte renaissance et flûte baroque, presque aussi puissantes mais plus souples que la renaissance).

Je vous propose maintenant de découvrir la sonorité de ces flûtes, tout d'abord avec le trio Vesini, qui nous joue Josquin des Prés (1450-1521) et Vincenzo Ruffo (1508-1587) :



Vous pourrez entendre plus particulièrement le son de la soprano, jouée ici sur une sonate de Giovanni Battista Fontana (1589-1630) par Sophie Botté (professeure de flûte à bec à Bois-Colombes). C'est à peu près tout ce que j'ai trouvé, mais à mon avis la vidéo ne rend pas tellement hommage au son réel de cette flûte, qui me semble plus chaud et plus "rond" :

jeudi 24 janvier 2019

Paul's Steeple (The Duke of Norfolk)

Paul's Steeple, connu aussi sous le titre de The Duke of Norfolk, est l'un de ces tubes intemporels dont on peut écouter de multiples interprétations et qu'on retrouve régulièrement en achetant un nouveau cédé de musique traditionnelle ou baroque. Mais ce qu'il y a de bien, c'est qu'on ne s'en lasse jamais et qu'on le redécouvre à chaque fois.

Je vous laisse écouter tranquillement la version des Witches (qui méritent un article), et on en reparle après :







Paul's Steeple (le clocher de Saint-Paul) est une Country Dance anglaise, publiée pour la première fois en 1651 par John Playford dans son fameux recueil The English Dancing Master.

John Playford (1623-1686) n'est pas un compositeur, mais un éditeur anglais ainsi qu'un danseur et maître de danse. The English Dancing Master est un recueil super connu de Country Dances (contredanses), contenant dans sa première édition une centaine de danses, pour aller jusqu'à plus de 900 au fil de ses 18 rééditions.


Le clocher de la Cathédrale Saint-Paul à Londres était connu au XVIe siècle pour sa hauteur, qui culminait à 164 mètres jusqu'à sa destruction par la foudre en 1561. Le reste de la cathédrale a été restauré, mais on n'a jamais reconstruit la flèche. Il existe même une comptine au sujet de ce clocher :
La Cathédrale Saint-Paul avant 1561

Upon Paul's steeple stands a tree, 
As full of apples as may be, 
The little boys of London town, 
They run with hooks to pull them down, 
And then they go from hedge to hedge, 
Until they come to London Bridge.


L'autre nom de la danse est probablement issu d'une ballade à la mémoire de Thomas Howard, quatrième Duc de Norfolk, exécuté en 1572 pour haute trahison par la reine Elisabeth I (il aurait voulu épouser Marie Stuart).

Je suis donc l'heureuse détentrice d'au moins 4 versions de Paul's Steeple (peut-être même plus, il est bien possible que je ne les aie pas toutes recensées). Comme d'autres musiques traditionnelles qui sont devenues archi-connues, une mélodie de base assez simple donne prétexte à de multiples variations dont certaines sont assez récurrentes, et d'autres plus créatives.

En voici donc quelques exemples, avec ou sans flûte à bec.


Frederic de Roos - La Pastorella (Flûtes d'Angleterre : The Delightfull Companion) :





Dorothee Oberlinger et Vittorio Ghielmi, dont je vous parlais il y a quelques jours :





À la viole de gambe et à l'archiluth avec Margaret Little et Sylvain Bergeron (sur mon cédé chouchou du dimanche matin) :




Ayant à peu près fait le tour de mes possessions, je vous propose quelques vidéos afin comme d'habitude de bien vous implanter la mélodie dans le crâne et si possible vous empêcher de dormir.

D'abord la brillante Hanneke van Proosdij, flûtiste à bec (et claveciniste) que je ne connaissais pas :



Le sautillant "duel violonistique au pub" de Jarte Eike et Milos Valent :



Un duo Ney - Flûte à bec original et créatif avec Rageed William et Annegret Fischer :



Et pour finir, car on pourrait facilement y passer la nuit, un trio punchy flûte à bec, chitarra battente et percu avec Alessandro de Carolis à la flûte à bec, que je découvre :



Dormez bien !

lundi 21 janvier 2019

Shopping brugeois

Ayant eu envie de regoûter un peu à la Belgique flamande, je suis allée entre amies passer le weekend du 11 novembre dernier à Brugge (Bruges).

C'est non seulement une ville superbe (un peu humide, mais bon, c'était le 11 novembre), mais outre moult marchands de chocolat, on y trouve un magnifique magasin de musique : Rombaux, dont la déco et l'aménagement sont restés tels qu'en 1920 (mis à part, je présume, les bacs et étagères à cédés).

Comme nous y sommes arrivées peu avant la fermeture, nous n'avons pas eu le temps de tout visiter et nous sommes restées au rez-de-chaussée, où se trouvent les cédés et les vinyles. Les instruments de musique sont à l'étage (je pense qu'ils sont surtout spécialisés dans les pianos et les guitares) et peut-être les partitions aussi, j'irai voir ça la prochaine fois (car il y aura vraisemblablement une prochaine fois, ayant aussi manqué de temps pour visiter la ville).

Les magasins de musique sont pour moi un peu comme les magasins de chocolat librairies : j'ai du mal à en ressortir les mains vides. Comme il m'était malgré tout difficile de m'y retrouver parmi toutes ces étagères de merveilles, je suis allée demander dans un mélange improbable de néerlandais et d'anglais où se trouvait le rayon flûte à bec. Leur classement est plutôt par compositeur, mais il y avait quand même une petite étagère réservée aux compils de quelques interprètes. J'ai hésité à choisir un cédé de Stefan Temmingh récemment découvert grâce à ce blog, mais je me suis finalement décidée pour un autre réunissant Dorothée Oberlinger avec son Ensemble 1700, et Vittorio Ghielmi avec Il Suonar Parlante : The Passion of Musick, English and Celtic Music of the 17th Century.

Dorothée Oberlinger est une flûtiste à bec allemande née en 1969. Elle a étudié la flûte à bec à Cologne, Amsterdam et Milan. Elle a joué avec des ensembles et des orchestres baroques de renommée internationale, comme les Sonatori de la Gioiosa Marca, Musica Antiqua Köln, l'Académie de Musique Ancienne de Berlin. En 2002, elle a fondé l'Ensemble 1700. Elle a collaboré avec l'ensemble Il Suonar Parlante de Vittorio Ghielmi sur plusieurs cédés, dont Gipsy Baroque.

Le cédé rassemble donc des pièces baroques de compositeurs comme John Adson, Henry Purcell ou Mattew Locke, et des "tunes" traditionnels celtiques dont certains sont de vrais tubes comme Paul's Steeple ou Stingo (qui méritent un article à eux seuls). Les arrangements de Vittorio Ghielmi sur certaines pièces très connues comme celles de John Playford sont très créatifs et apportent un "sang neuf" à des musiques maintes fois entendues.


Adson's Masque





Le titre du cédé est celui d'une fantaisie de Tobias Hume (1569-1645), compositeur et violiste anglais, qui était aussi militaire de carrière pour gagner sa vie.

Tobias Hume : The Passion of Musick



mardi 15 janvier 2019

Blokfluitdagen 2018 - Jour 2 - Session 2

Après un nouveau pique-nique ensoleillé - bien qu'un peu frais - au bord du canal, et une promenade dans les jolies rues de Malines, nous étions prêtes à attaquer notre dernière demi-journée de pratique intensive.
Je décidai cette fois de retourner à la musique baroque, avec la Chaconne des Africains de ce cher Lully.

Giovanni Battista Lulli est un compositeur et violoniste italien naturalisé français, né à Florence le 28 novembre 1632 et mort à Paris le 22 mars 1687.

Ses origines sont modestes puisqu'il est fils de meunier, mais il se fait remarquer vers l'âge de 14 ans par Roger de Lorraine, Duc de Guise qui l'amène à Paris chez sa nièce, la Duchesse de Montpensier, qui voulait apprendre l'italien. Elle l'envoie au départ en cuisine (peut-être à cause de son physique ingrat), puis finit par se rendre compte de son talent pour la musique (on ne sait pas trop comment). Il est formé par les grands maîtres qui fréquentent le salon de la Duchesse, apprend le violon, le clavecin, la théorie et la composition musicales et crée pour sa protectrice la Compagnie des Violons de Mademoiselle.

En 1652, suite à la Fronde à laquelle elle a pris part, la Duchesse de Montpensier doit fuir et Louis XIV engage alors Lulli en qualité de violoniste et de danseur. Il obtient petit à petit les faveurs du roi en se pliant opportunément à ses intérêts pour la musique et pour la danse, se fait naturaliser en 1661 sous le nom de Jean-Baptiste Lully, et devient surintendant de la musique du roi. Il réussit à acheter un privilège qui lui donne le monopole de l'opéra : personne d'autre que lui ne peut monter d'opéra sous peine d'amende (trop fort), ce qui l'aide beaucoup à faire fortune.

Lully a inventé avec Molière la comédie-ballet (comme le Bourgeois Gentilhomme), et créé l'opéra français sous forme de tragédie lyrique, en combinant les différents genres musicaux de la France du XVIIe siècle (ballet de cour, tragédie, pastorale, comédie, opéra italien). Le premier de ces opéras français, créé en 1673, est Cadmus et Hermione dont est extraite la Chaconne des Africains.

Outre ses talents musicaux, Lully est aussi connu pour son sale caractère, son attirance autant pour les hommes que pour les femmes (bien qu'il fût marié), et sa mort aussi bête qu'originale : alors qu'il dirigeait  la répétition du Te Deum qu'il devait faire jouer pour célébrer la guérison du roi qui avait été malade, il s'est fâché très fort contre ses musiciens et s'est donné un grand coup de son bâton de direction d'orchestre dans l'orteil ; s'en est suivie une infection, et comme il n'y avait pas d'antibios à l'époque et qu'il a refusé qu'on lui coupe la jambe, la gangrène s'est généralisée et il est mort le 22 mars 1687, à 55 ans.

Je vous ai déjà fait entendre la Chaconne des Africains ici, mais je vous remets cette interprétation  de l'ensemble brésilien Quinta Essentia Recorder Quartet, qui est quand même bien sympa :



Cadmus et Hermione est une tragédie mise en musique avec un prologue et cinq actes sur un poème de Philippe Quinault d’après Les Métamorphoses d’Ovide, créée à l’Académie royale de musique le 27 avril 1673 et dont l'argument est le suivant : le prince égyptien Cadmus, parti à la recherche de sa sœur Europe, s’est arrêté en Grèce où il est tombé sous le charme d’Hermione, fille de Mars, mais celle-ci est déjà promise au roi de cette contrée, le géant Dracon, protégé du dieu. Pour la conquérir, Cadmus doit donc surmonter les obstacles dressés par Mars autour de la princesse, mais il est aidé par Pallas qui transforme Dracon en statue. Junon enlève Hermione, mais l'amour finira par triompher et les deux amants se marient sous les auspices de l'Olympe.


Voici la version ballet du Poème Harmonique (malheureusement la qualité n'est pas très bonne) :



Et celle de l'inégalable Eduardo Antonello, avec deux flûtes à bec sur le lit et le fauteuil à bascule :



La Chaconne est une danse lente à trois temps apparue en Espagne au XVIe siècle, et qui a donné naissance à une pièce instrumentale formée de variations sur un motif répété à la basse. On la trouve dans des suites de danses de la période baroque, et elle est parfois appelée Passacaille bien qu'il semble y avoir pour certains compositeurs des nuances assez floues entre les deux.


Des chaconnes ont été écrites par des compositeurs  contemporains, comme Matthias Maute :



Cette session était (très) animée par Barbara Belza, professeure de flûte à bec à l'Académie de Musique de Geel dans la province d'Anvers. Barbara est néerlandophone, mais tellement expressive que j'ai à peine eu besoin qu'on me traduise ses explications, qui étaient vraiment très intéressantes. Elle a aussi eu la bonne idée de nous faire écouter la pièce en début de session.

dimanche 13 janvier 2019

Blokfluitdagen 2018 - Jour 2 - Session 1

Après ce tour de chauffe, j'ai choisi pour varier les plaisirs de découvrir la musique chinoise avec des pièces de Lance Eccles.

Lance Eccles est né le 17 mars 1944. Il est maître de conférences en chinois à l'Université Macquarie de Sydney. De 1982 à 2002, il était membre du Reluctant Consort.

En plus d'écrire de la musique pour flûte à bec, il s'intéresse beaucoup aux langues, anciennes et modernes. Il a publié des ouvrages sur le dialecte chinois de Shanghai, sur la langue copte de l'Égypte ancienne et sur la langue tétoum du Timor oriental, ainsi qu'un commentaire grammatical sur la version syriaque de l'évangile de Marc.

Et en plus du chinois, il enseigne également le copte chaque année à l’Université d’été Macquarie pour les langues anciennes.

Les pièces que nous avons jouées sont extraites du recueil Shaanbei : revolutionary folksongs from North West China for five recorders, descant, treble, tenor, bass and great bass.

Shaanbei signifie "province du Shaanxi du Nord", et ces chansons sont adaptées d'airs traditionnels de cette partie de la Chine. Au cours des années 1930, le Parti communiste chinois y a établi sa base et a adapté de nombreuses chansons locales à ses objectifs politiques. Au cours des décennies suivantes, ces mélodies sont devenues bien connues dans toute la Chine.
En les harmonisant, Lance Eccles a pris soin de préserver leur style chinois. 

Nous n'avons pas pu garder les partitions, et je ne me souviens que de la première (je pense que nous en avons déchiffré deux) : Our Leader Mao Zedong (tout un programme).

Je m'étais positionnée en voix d'alto, mais encore une fois il y en avait beaucoup, et on avait besoin de voix aiguës. Nous étions deux sopranos, mais comme il n'y avait pas assez de ténors ma camarade a migré et je me suis finalement retrouvée à jouer de la sopranino (obligeamment prêtée par la prof), ce qui convenait assez bien au caractère de la pièce (les chanteuses chinoises ont souvent des voix très très aiguës).

Je n'ai pas trouvé d'interprétation de la pièce de Lance Eccles, il faudra donc vous contenter de la version vocale chinoise, 抱歉 (vous allez très vite comprendre ce que je voulais dire par "très très aiguës").


Cette session était dirigée par Sonja Mertens, professeure de flûte à bec à Brasschaat dans la province d'Anvers.

Blokfluitdagen 2018 - Jour 2 - Tutti

Après vous avoir tenus en haleine durant presque quatre longs mois, voici enfin la suite tant attendue de mes aventures malinoises.

Suite à une courte nuit de sommeil - puisque après le superbe concert de l'ensemble Odyssee, il a fallu nous dépêcher de rejoindre la gare de Malines puis rentrer à Bruxelles, préparer nos gamelles pour le lendemain, et nous lever de bonne heure pour être de nouveau sur place le samedi à 9 heures - nous voici donc fin prêtes pour notre deuxième journée, qui comme la veille commence par une samenspelsessie : la session de jeu d'ensemble qui réunit tous les participants. N'étant pas arrivées très en avance, il a fallu que je demande (en anglais) à rajouter deux places alto et nous nous sommes retrouvées derrière les contrebasses et même sous-contrebasses.


En ce deuxième jour, la Suite X de Schein nous emmène au début de la musique baroque.

(J'avais étourdiment basé mon article sur la Suite X de Scheidt, jusqu'à ce que j'insère la vidéo et que je me rende compte qu'il s'agissait en fait de la Suite X de Schein - raison pour laquelle sans doute je n'ai pas pu trouver d'enregistrement de la Suite X de Scheidt, qui n'existe vraisemblablement pas. Me voilà donc contrainte de réécrire entièrement mon article).


Johann Hermann Schein est un compositeur et poète allemand né en 1586 en Saxe et mort en 1630 à Leipzig.
Cantor (chantre d’église), poète, compositeur, maître de chapelle, latiniste et pédagogue, Johann Hermann Schein est le deuxième des « trois S » de la musique allemande du XVIIe siècle, avec Heinrich Schütz (1585-1672) et Samuel Scheidt (1587-1654) (d'où ma confusion). Malgré sa mort précoce à l'âge de quarante-quatre ans, pendant la guerre de Trente Ans, bien avant celle des deux autres « S », il a eu une grande influence sur la musique allemande à la fois par sa musique profane et religieuse.

Schein a été le premier compositeur allemand à s'inspirer des nouveautés de la musique baroque italienne, bien que n’ayant jamais quitté l’Allemagne.

Il a principalement écrit de la musique vocale, et un seul recueil de musique instrumentale, le Banchetto musicale en 1617. Celui-ci contient 20 suites et variations, et constitue l'un des plus anciens exemples de cette forme musicale. Les suites sont conçues comme de la musique d'accompagnement ("musique de table") pour les dîners à la cour de Weissenfels et de Weimar où il était directeur de la musique et maître de chapelle, et devaient être exécutées sur un ensemble de violes mais Schein précise que cette musique peut être jouée sur toutes sortes d'instruments. Elles sont constituées d'une série de danses : pavane, gaillarde, courante et allemande.



Et pour écouter un petit bout de notre interprétation, c'est toujours sur la page FB de Blokfluitdagen.

TWV BWV RV HWV K SSWV

A la vôtre !

Non mais, en vrai, ne vous êtes-vous jamais demandé ce que signifiaient toutes ces lettres bizarres derrière les noms des œuvres ?

Fantaisie en do majeur TWV 40:2
Prélude BWV 536a
Concerto en ré majeur RV 209
Sonate en sib majeur HWV 357
Concerto pour hautbois K314

etc... etc...

Bon, prenons un exemple simple, disons... la sonate en do majeur. À votre avis, il y en a eu combien de composées dans l'histoire de la musique, des sonates en do majeur ? Alors de laquelle je parle, là ? 
Ah ! Je vois une petite main qui se lève, oui, une idée ? On pourrait préciser le nom du compositeur ? Oui ! Très bien ! Alors on va dire, la sonate en do majeur de Vivaldi. Mais savez-vous combien il en a composées, Vivaldi, des sonates en do majeur ? 

Encore une idée ? On peut aussi préciser pour quels instruments ! Mais bien sûr ! La sonate en do majeur de Vivaldi pour violon et basse continue. Très bien ! Mais... il aimait bien ça, Vivaldi, les sonates en do majeur pour violon et basse continue...

Alors on fait comment ?

Eh bien, on fait des catalogues.

Dans certains cas, comme pour Beethoven par exemple, l'éditeur a attribué aux œuvres un numéro d'opus ("oeuvre" en latin) au fur et à mesure de leur parution, nous avons donc un catalogue chronologique tout prêt. Pratique !

Mais ce n'est pas toujours le cas, alors à un moment d'astucieux (et courageux !) musicologues ont entrepris de classer les œuvres des compositeurs par genre ou chronologie, en leur attribuant un code.

Parfois, ces musicologues ont choisi leur initiale suivie d'un numéro. C'est le cas par exemple de Ritter von Köchel qui a classifié chronologiquement les œuvres de Mozart : Concerto pour hautbois K314
D'autres, plus modestes, n'ont pas utilisé leurs initiales mais une abréviation, comme Monsieur Schmieder qui a préfixé les œuvres de Bach par les lettres BWV (Bach Werke Verzeichnis = Liste des œuvres de Bach).


Quelques exemples :

BWV : Bach Werke Verzeichnis
HWV : Haendel Werke Verzeichnis
K : Mozart (pour Köchel)
PB : Boismortier (pour Perreau / Boismortier)
RV : Vivaldi (pour Ryom / Vivaldi, mais il existe d'autres catalogues pour Vivaldi)
SSWV : Samuel Scheidt Werke Verzeichnis
TWV : Telemann Werke Verzeichnis

et bien d'autres...

samedi 12 janvier 2019

Premières Amours

En plus d'être passablement occupée et pré-occupée par moult sujets plus ou moins contrariants, ainsi que par les concerts et festivités de fin d'année, j'ai vu mon ordinateur connaître une fin brutale quoique pas complètement surprenante. Il m'a fallu le temps de me ré-équiper - de façon beaucoup plus confortable - et me revoici.

L'une de mes premières vraies belles découvertes au cours de mon apprentissage de la flûte à bec fut les sonates de Haendel, au début de ma troisième année si mes souvenirs sont bons. J'en ai chez moi plusieurs versions mais comme souvent, la première que j'ai écoutée - et ré-écoutée - et ré-ré-écoutée - et... (ad lib) est restée la plus chère à mon ouïe : celle de l'Ensemble Fitzwilliam avec Jean-Pierre Nicolas à la flûte à bec (je n'aurais pas dû cliquer sur l'onglet Discographie du site de l'Ensemble Fitzwilliam avec ses extraits à écouter ; il y a maintenant 3 cédés de plus dans ma wish list).

Parmi ces sonates, je suis plus particulièrement tombée amoureuse d'un mouvement : l'andante de la sonate en ré mineur HWV 367 que je vous fais écouter de ce pas, dans ma version préférée donc.





Voici pour comparer une autre interprétation de cet andante, cette fois par Hugo Reyne, qui est très bien aussi mais que j'aime moins (et comme je vous ai fait écouter l'autre avant, peut-être que vous l'aimerez moins aussi ahahah).




(Vous remarquerez que cette version fait 35 secondes de plus : Jean-Pierre jouerait-il plus vite que Hugo ? En outre je trouve que le clavecin est trop présent - et non, je ne suis pas partiale)


Georg Friedrich Haendel est un compositeur allemand né en 1685, et naturalisé anglais en 1726. Son papa, qui était chirurgien, n'était pas très d'accord pour qu'il fasse de la musique (il lui avait carrément interdit de toucher un instrument), mais quand on est motivé... et doué, ce qui ne gâte rien...

Haendel était un musicien très apprécié dans l'Europe de son époque (il est mort aveugle, mais riche), qui a su mélanger les influences de la musique baroque allemande, anglaise, française et italienne. 


Cette sonate en ré mineur HWV 367 (je vous explique très bientôt la signification de HWV 367 dans un article spécialement consacré au recensement des oeuvres musicales des compositeurs prolifiques) est composée de sept mouvements : Largo, Vivace, Presto (parfois intitulé Furioso selon les versions), Adagio, Alla breve, Andante, A tempo di menuet.  Elle a vraiment été composée pour la flûte à bec (et le clavecin), il ne s'agit donc pas d'une transcription.

Alla breve : locution italienne désignant, dans la musique ancienne, la mesure ayant la brève pour unité et renfermant, par conséquent, 2 semi-brèves ou 4 minimes, soit en figures modernes, une carrée, ou deux rondes, ou quatre blanches. On l'indique par le C barré. Il s'agit en réalité d'une mesure à deux temps rapide, la durée des notes ayant subi une sorte d'inflation au fil des siècles... La noire correspondait à la demi-minime et la croche à la fuse. 

 A tempo di menuet : invitation à jouer le mouvement avec le style et le tempo d'un menuet (plutôt lent et gracieux, à trois temps).

Comme vous êtes chanceux, vous pouvez écouter toutes les sonates par l'Ensemble Fitzwilliam sur cette vidéo (sonate en ré mineur HWV367 à 35:40) :


(Vous n'êtes plus chanceux du tout car la vidéo a été supprimée, un peu de patience, je vous la remplace très bientôt).