jeudi 15 novembre 2018

Enfin !

Me rendant la semaine dernière au magasin de musique faire l'emplette d'un instrument dont je vous parlerai plus tard, alors que je patientais à la caisse, mon œil pourtant dépourvu de lunette fut attiré vers un présentoir empli de brochures vertes et jaunes complètement floues. Une irrépressible intuition dirigea alors ma main vers l'un de ces opuscules, et quelle ne fut pas mon allégresse : Les Musiciens de Saint-Julien avaient enfin publié les partitions de The High Road to Kilkenny 💕

Ayant déjà en ma possession celles de For Ever Fortune, que j'exploite allègrement, j'attendais cette parution avec impatience depuis la sortie du cédé.
L'avantage est que j'ai eu plusieurs années pour me faire l'oreille à ces mélodies que j'écoute souvent, et ça facilite évidemment le jeu.

The High Road to Kilkenny est donc un recueil de musique ancienne d'Irlande des XVIIe et XVIIIe siècles, avec à la fois des poésies en gaélique mises en musique, raffinées et savantes, et des pièces plus récréatives de chansons et de danses. Toutes ces pièces, indépendamment de l'instrument pour lesquelles elles ont été écrites (harpe, violon, flûte, hautbois) se prêtent remarquablement bien à la flûte à bec, soprano ou alto, moyennant parfois quelques petites adaptations pour certaines notes qui sortent de notre ambitus.

Je me suis empressée d'en déchiffrer quelques unes, et force est de constater qu'elles ont l'air en moyenne plus difficiles que celles de For Ever Fortune. Je me consacre pour le moment à Sir Ulick Burke, à la soprano, que je vous fais entendre ci-dessous (dans la version originale) :





Il s'agit d'une pièce de Turlough O'Carolan (1670-1738) - en irlandais Toirdhealbhach Ó Cearbhalláin - dont je vous parlais déjà ici. La situation des musiciens en Irlande à cette époque était difficile et dépendait du patronage d'aristocrates comme ce Sir Ulick Burke dont il est question dans la chanson. O'Carolan, arrivant chez Sir Ulick au sortir d'une tempête de neige, se mit à chanter cette chanson et comme il était aveugle, il ne s'aperçut de la mort de son bienfaiteur que quand l'auditoire commença à pleurer en entendant chanter son nom.


Vous pourrez voir et entendre Les Musiciens de Saint-Julien interpréter les titres du cédé (et aussi certains de For Ever Fortune) en décors naturels irlandais sur ce magnifique film d'Arte (Sir Ulick est à 24:15) :


Le recueil de partitions peut être commandé sur le site des Musiciens de Saint-Julien.

jeudi 1 novembre 2018

Festivals d'automne #2 (The Curious Bards)

Je vais vous parler aujourd'hui d'un concert entendu le 2 octobre au Festival Baroque de Pontoise, à Pontoise (ce qui n'est pas si évident que ça en a l'air car ce festival est réparti sur de nombreux sites du Val d'Oise et pas seulement à Pontoise). J'ai parfaitement le droit d'en parler ici car il y avait des flûtes dedans, même si pas à bec, mais presque avec le tin whistle.

Je pensais jusqu'à présent que seuls les Musiciens de Saint-Julien s'étaient intéressés aux répertoires écossais et irlandais du XVIIIe, or il n'en est rien : les Curious Bards (*) aussi.
Cet ensemble a été fondé en 2015 par le violoniste Alix Boivert, qui rassemble autour de lui un flûtiste - traverso et tin whistle (Bruno Harlé), une gambiste (Sarah van Oudenhove), Jean-Christophe Morel qui joue du cistre irlandais baroque et Louis Capeille à la harpe triple baroque. Sur ce programme est aussi invitée la mezzo-soprano Ilektra Platiopoulou.

L'objectif de l'ensemble est donc de remettre en lumière la musique écossaise et irlandaise du XVIIIe siècle, qui constituait à l'époque une grande partie du patrimoine culturel de ces pays mais qui, malheureusement, n'a pas toujours été bien conservé à cause en particulier des conflits avec l'Angleterre, cette dernière n'ayant bien sûr pas intérêt à voir se propager et se perpétuer les mythes traditionnels et les langues régionales.

Un petit avant-goût de ce programme :



Et un échantillon de ce premier cédé [ex]tradition - dont le concert reprenait les titres, qui je l'espère sera bientôt suivi par d'autres.

A set of three irish airs


Since sounding drums (irish air)

Après environ 15 minutes de concert, l'alarme incendie a retenti de façon péremptoire dans la salle, invitant tout le monde à sortir sans délai. Il s'agissait finalement d'un dysfonctionnement du système, mais il a quand même fallu attendre 30 minutes que les pompiers viennent vérifier qu'il n'y avait effectivement aucun danger. Pour l'anecdote, l'alarme s'est déclenchée pendant la suite Highland Battle, qui retrace en 8 mouvements le déroulement d'une bataille, et justement pendant le mouvement The Retreat (la Retraite), ce qui a fait dire à Alix Boivert qu'il n'avait jamais eu un public aussi réactif...

Pour en apprendre un peu plus, voici deux vidéos de présentation de l'ensemble et de sa démarche :




(*) le barde était chargé, dans les sociétés celtes de l’Antiquité, de perpétuer la tradition orale notamment par la musique et le chant.